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"Les Enfants Adoptés De Roumanie" (L.E.A.D.R.) était une réunion de personnes bénévoles : nés en Roumanie et adoptés par des couples francophones, et des personnes sensibles aux questions de l'adoption internationale en Roumanie. De 2014 à 2015 LEADR a créé des espaces et des outils adressés aux adoptés d'origine roumaine pour faire entendre leur parole et pour contribuer à leurs recherches. Aujourd'hui le collectif a évolué en Association Française Orphelins de Roumanie (A.F.O.R.), association loi 1901, créé en septembre 2015 : www.orphelinsderoumanie.org

vendredi 30 mai 2014

Documentaire : Naomi kawase, réalisatrice








Dans ses bras
(Ni Tsutsumarete), 1992, 40"

&

Le ciel, le Vent, le Feu, l'Eau et la Terre
(Kya Ka Ra Ba A), 2001, 55"

&

Escargot
(Katotsumori), 1994, 40''

Naomi Kawase



Naomi Kawase (30 mai 1969) est Diplômée de l’Ecole de photographie d'Osaka, elle y enseigne pendant quatre ans avant de se lancer dans la réalisation de courts-métrages en 8mm et 16mm à la fin des années 80. Elle réalise son premier long métrage,Suzaku, situé dans sa province natale de Nara, avec lequel elle remporte la Caméra d'or au Festival de Cannes 1997. La Forêt de Mogari, son quatrième long-métrage de fiction, reçoit le Grand Prix du jury lors de la 60e édition du festival (2007). Elle est membre du Jury du Festival de Cannes 2013. Elle présente en compétition, en 2014 au 64ème festival de Cannes, son dernier long métrage "Deux fenêtres".

Message de la réalisatrice à la cinémathèque française pour sa rétrospective (17 octobre - 12 novembre 2012) : 


Message de Naomi Kawase à la Cinémathèque... par lacinematheque





Dans ses bras




Dans ses bras, inaugure une série de courts métrages, documentaires expérimentaux autobiographiques. Naomi Kawase a été adoptée et élevée par sa grande-tante et son grand-oncle. Dans ces premiers travaux, elle "rassemble les morceaux d’une enfance brisée. Un faisceau d’émotions pour donner du sens à la quête du père. Naomi Kawase a 23 ans lorsqu’elle décide de partir à la recherche de son père, cet inconnu dont les seules traces qu’elle possède sont quelques photographies et son livret de famille.
Le divorce de ses parents a provoqué jadis le départ de [ce dernier], qui n’est jamais revenu. Sa mère s’occupe de sa carrière. Naomi grandit chez [sa grande-tante et son grand-oncle], mais garde néanmoins quelques impressions fugaces de la vie en famille et du bien-être éprouvé aux côtés de ses parents. Elle se sent coupée injustement de son identité." (1)



La réalisatrice explique : "Depuis un an, je cherchais mon père. J'ai voulu tout arrêter à mi-chemin, car j'avais peur.  Mon père allait probablement me dire : "Je ne te connais pas." Cela aurait été nier mon existence dans ce monde, ainsi que tous les efforts endurés dans ce travail de recherche pour se rapprocher de lui. Mon père, après notre séparation, a déménagé à dix endroits différents. Pendant vingt ans, j'ai vécu dans plusieurs maisons. J'étais attachée à chacune d’elles. Bien sûr, mon père avait disparu, mais ce que je voulais, c'était juste retrouver la trace de ce qu'il avait été et ses souvenirs. J'ai essayé de ressentir ce qu'il avait vécu. J’allais de ville en ville pour filmer le coucher du soleil, le balancement de l'arbre dans le vent, en écoutant les enfants jouer.

Filmer ces scènes était important pour moi. 
Probablement, les souvenirs de mon père ou de ma mère sont semblables à ce que j'ai capté. Je les ai recréés. Comme je le disais au début, j’avais pu expérimenter la beauté des rendus en filmant avec la caméra 8mm. Je suis juste allé à ces endroits et j'ai essayé de récupérer et de restaurer ce temps perdu qu’ils ont vécu. (Ce ne sont pas des lieux qui m'ont été indiqués par mes parents).

Pour moi, ces moments de partage avec mes parents n'ont jamais existé. Je ne pourrais pas les vivre avec eux, donc "je me régénère". " (2)

La réalisatrice retrouve la trace de son père biologique, et malgré les mises en garde de sa "grand-mère", elle se donne le courage d’appeler son père.


"Dans le final du film, [...] nous parlons mon père et moi par téléphone. Nos voix se sont trouvées.  A cet instant, mon père m'a appelé par mon prénom : Naomi.

Ce mot m’était suffisant. Pour moi, c'était comme si je pouvais admettre mon existence dans le monde et parmi mes pairs. Jusque-là, mon corps existe « ici », et je vis, et j'ai mes amis.

Mais ... il y avait quelque chose qui me donnait l'impression que mon corps n'existait pas ou  qu'il ne pouvait pas exister.

Entendre mon nom, « Naomi », m'a permis de remplir ce sentiment de vacuité. 

De cette manière, à travers la création de films, j’ai construit une digue pour continuer à vivre. Et pour le démontrer, le comportement des gens à mon égard a changé après avoir vu le film. Ils ont commencé à voir que j’existe dans ce monde, que « je suis » ... réellement." (2)

Pour Naomi Kawase les films et la vie sont toujours liés. Ils progressent comme deux roues l’une à coté de l’autre.




Le ciel, le Vent, le Feu, l'Eau et la Terre






Le titre "Kya Ka Ra Ba A" est un terme bouddhiste, kya - le ciel, ka - vent, ra - feu, ba - eau, et A - la terre, qui, signifie que le monde est composé de ces éléments.


Plus d'un an s'est écoulé depuis la mort du père biologique de Naomi Kawase. Huit ans après Dans ses bras on voit la réalisatrice porter un regard nouveau sur ce court métrage dans lequel elle tente de retrouver son père. Elle le visionne les images avec ses amis. 



Au cours de ce Le Ciel, le Vent, le Feu, l'Eau et la Terre, on suit la réalisatrice tout au long de cette nouvelle introspection, notamment lors d'un rendez-vous avec un tatoueur, qui se transforme en discussion sur la signification de sa démarche générale de deuil : comme un ultime défi, elle décide de se faire reproduire sur tout le dos le même tatouage que portait son père, besoin de conserver des traces de son passé douloureux. "Les tatouages sont gravés non seulement sur votre corps mais aussi dans votre âme. Beaucoup d’aiguilles", prévient le tatoueur.


Toute sa vie, Naomi gardera la marque de sa souffrance. Mais son attachement à la nature, au "coucher de soleil flou", aux gouttelettes d’eau et aux chants d’oiseaux résonne comme un espoir ...
Ce film agit comme un exutoire à un hors champ privé insoutenable." (3)






Escargot





On voit la réalisatrice dans une autre vidéo où la réalisatrice explique sa démarche, ses questionnements, son rapport au temps, sa valeur en tant qu'être humain et en tant que cinéaste (en anglais) :





Evénement TEDx-Tokyo (4)

Deux ans après Dans ses bras, Naomi Kawase réalise Escargot (Katatsumori). 
La réalisatrice explique : "Ce qui pouvait m’amener à habiter la réalité, n'était ni mon père, ni ma mère, mais ma "grand-mère", qui était avec moi toutes ces années. 
Bien que ce n'était pas ma vraie grand-mère, elle s'occupait de moi et elle m'a fait me sentir importante. 

J'ai pensé enregistrer notre vie quotidienne. Le film s'appelle "katatsumori. Il signifie «escargot». Il s'agit en fait d’un nom propre, parce qu’il existe un escargot qui s’appelle Katatsumuri.


Vous savez ce qu'est un escargot? 

L'escargot a une carapace. Si vous enlevez la carapace, il devient une simple limace ! [Amusée] 

Petite, je pensais que c’ était la vérité ! Je me sentais comme une limace. Ceux là semblaient avoir une carapace, comme une maison. Dans [Dans ses bras], j'aurais aimé vivre avec mon père. Enregistrer ma vie de tous les jours avec ma grand-mère était comme la création d'une carapace avec elle, devenant ainsi une sorte d’escargot.
C'est un jeu de mots, car «Tsumori» signifie « faux » ou « avoir l'intention de... », prétendre être un escargot. Donc au lieu de « Katatsumuri » cela est devenu « Katatsumori ». Il y a là de mauvaises plaisanteries au Japon, à propos des hommes d'âge moyen. Ils remplacent des lettres ou des mots phonétiquement similaires par d'autres, pour signifier différentes choses. Le titre de mon film est comme l'une de ces blagues." (2)






(1) Résumé en français sur le site Film-documentaires [en ligne] : http://www.film-documentaire.fr/Ni_Tsutsumarete.html,film,12285 

(2) Captation de l'intervention de Naomi Kawase lors de la master class pour le Festival de cinema "4+1", 26-30 octobre 2011 (Traduction Laura G.) [en ligne]: http://article.wn.com/view/2014/02/03/top_200_most_anticipated_films_for_2014_192_naomi_kawase_x20/

(3) fiche du film sur sur le site Film Documentaire [en ligne] : http://www.film-documentaire.fr/Kya_Ka_Ra_Ba_A.html,film,12287 

(4) Les conférences TED (Technology, Entertainment and Design), sont une série internationale de conférences organisées par la fondation à but non lucratif Sapling foundation. Cette fondation a été créée pour diffuser des « idées qui valent la peine d'être diffusées » (en anglais : ideas worth spreading).


Site officiel de la réalisatrice : http://www.kawasenaomi.com/en/works/documentary_film/kya_ka_ra_ba_a/


iconographie : Première image, capture d'écran, In Dans ses bras de Naomi Kawase.
Deuxième image, capture d'écran, In Katsumori de Naomi Kawase projeté lors de la master class de Naomi Kawase lors du festival de cinéma "4+1" [en ligne] : http://article.wn.com/view/2014/02/03/top_200_most_anticipated_films_for_2014_192_naomi_kawase_x20/ 



1 commentaire:

  1. Je trouve la grande pudeur japonaise de sa camera est extrêmement violente. Surtout ce plan, où on la voit tenant la camera, à l’intérieur derrière la fenêtre. Tentant de toucher sa grand mère, à l’extérieur... La juxtaposition des éléments rapprochent les sujets... mais ils sont séparés. Sa main se pose sur la vitre de la fenêtre. Cette démarcation, cette césure, voire cette dichotomie est très forte pour un enfant qui a grandi dans une famille et un pays où il n'est pas né, dont il n'est pas issu, et cela dépasse bien entendu le cas de l'adoption. Ses images me font penser au cinéma d'Ozu... de ce fameux plan où la grand mère cherche à tenir son petit fils haut comme trois pommes... mais qui la fuit.

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